Nous ne pourrions pas nourrir toute la planète sans OGM. Vous les Africains, les Amérindiens, les Asiatiques, vous ne savez pas vous nourrir tout seul, vous ne savez pas comment vous y prendre. Nous, l'homme blanc occidental, allons vous apporter nos prouesses technologiques avec, à la clé, de la nourriture en abondance! Ce mythe des OGM est un des mutiples exemples de paternalisme qui a la peau dure. Un mythe entretenu par les bonimenteurs et manipulateurs de Vie: le monde surpuissant des biotechnologies.
Déjà mentionné a plusieurs reprises, un rapport de la FAO a enfin admis que l'agriculture biologique (locale et traditionnelle) permettrait non seulement de résoudre les problèmes de faim dans le monde mais de considérablement réduire l'émission de gaz à effet de serre. Car, faut-il le rappeler, l'élevage et l'agriculture intensive contribuent pour 25% à l'effet de serre mondial. Voir aussi l'excellent article de Dominique Guillet.
Et si, en dehors de toute considération commerciale nous analysions le point de vue purement scientifique, biologique, évolutif? Quel est, ou pourrait-être, le véritable impact des OGM sur la vie: l'homme et la nature?
« J’ai l’impression que la science a franchi une barrière qui aurait dû rester inviolée. »
– Dr Erwin Chargaff, biochimiste et père de la biologie moléculaire.
Briser les barrières biologiques
On ne peut pas croiser un poisson et une fraise, qu'importe l'effort que l'on y consacre – ou du moins jusqu'alors. Aujourd'hui, les généticiens sont capables d'extraire un gène qui produit l'antigel naturel du flet arctique et de l'introduire dans un fraisier de sorte que son fruit résiste au gel. Mais ce tour de force ne peut s'accomplir qu'en utilisant des gènes spécialement conçus pour faciliter le processus.
Une fois que tous ces gènes sont insérés, leur destination finale et leurs effets potentiels restent inconnus. L'unique partie précise de cette technique est l'identification et l'extraction de l'ADN portant le caractère recherché dans l'organisme donneur.
Ce que l'on sélectionne finalement pour des tests approfondis et une mise sur le marché, ce sont les "heureux accidents" qui semblent fonctionner.
Nous sommes devant un processus et non devant un produit
La controverse publique sur les OGM porte essentiellement sur les produits, sur la manière dont ils sont commercialisés et sur ce qui est planté, sur le lieu où cela est planté. Mais il se trouve aujourd'hui que le processus utilisé pour obtenir lesdits produits, et les constructions génétiques originales utilisées au cours de ce processus, pourraient constituer une menace encore plus importante pour la santé des hommes et de l'environnement que les produits eux-mêmes.
Il existe des rapports sur des réactions allergiques aux aliments transgéniques : d’après un rapport paru dans Nature Biotechnology, par exemple, le très communément utilisé virus de la mosaïque du chou-fleur contiendrait un "point névralgique de re-combinaison" qui le rend instable et sujet à causer des mutations, le cancer, et de nouvelles pathologies. La British Medical Association et la U.S. Consumer’s Union ont toutes deux prévenu contre les nouvelles allergies et/ou les effets néfastes des aliments transgéniques sur le système immunitaire. Et les responsables de la santé publique en Europe sont inquiets de ce que les gènes marqueurs de la résistance antibactérienne des OGM pourraient rendre les antibiotiques inefficaces. Seule une dizaine d’enquêtes ont été menées sur la santé humaine et les OGM et la moitié d’entre elles donnent des raisons de s’inquiéter ; parmi celles-ci des organes mal formés, des tumeurs, et la mort prématurée observée chez les rats.
L'on signale de plus en plus de cas d'un phénomène auparavant considéré comme rare : "le transfert horizontal de gènes" qui se produit lorsque les gènes ne se déplacent pas que "verticalement" à travers les processus normaux de la digestion et de la reproduction, mais latéralement, entre les organes du même corps ou entre des organismes – un peu à la manière de Casper le fantôme passant à travers un mur. La généticienne Mae-Wan Ho, qui décrit ce phénomène depuis des années, déclare qu'il se produit parce que la nouvelle technologie "transgresse toutes les lois de l'évolution ; elle court-circuite complètement l'évolution. Elle contourne la reproduction, crée de nouveaux gènes et des combinaisons de gènes qui n'ont jamais existées et ignore les barrières habituelles entre les espèces".
Un nouveau rapport, basé sur des recherches revues par des scientifiques et des documents de l'USDA a révélé que l'intégrité d'une plante subit d'importants dommages génétiques lorsqu'elle est modifiée, notamment le réaménagement des gènes sur le site de l'insertion et des milliers de mutations et de modifications incontrôlées à travers la plante transgénique.
Contamination stratégique
Aujourd'hui, parce que les gènes résistants aux herbicides pénètrent dans toutes sortes de plantes, les planteurs doivent affronter de "super mauvaises herbes" qui ne peuvent être combattues avec des produits chimiques habituels.
Ce qui fait des OGM une menace pour l'environnement c'est que, contrairement à la contamination chimique, les OGM sont des organismes vivants capables de se reproduire et de se re-combiner, et une fois libérés, ils ne peuvent être rappelés.
A titre d'exemple de ce qui peut arriver, une étude a montré que lorsque 60 poissons transgéniques sont libérés au milieu d'une population de dizaines de milliers de poissons sauvages, tous les poissons sauvages sont décimés en seulement 40 générations. Et que se passera-t-il, avec des plantations d'arbres transgéniques capables de répandre du pollen d'OGM jusqu'à 40 miles à la ronde et sur plusieurs décennies ? En l'absence de restrictions physiques ou réglementaires, les OGM constituent une menace très réelle pour l'intégrité biologique de la planète.
L'industrie appelle la contamination une "présence fortuite", comme si c'était une conséquence bénigne mais en tout cas inévitable de la vie moderne, comme la radiation naturelle causée par les tests nucléaires. Elle s'oppose aux tests indépendants et tire ainsi profit de l'absence de données pour fournir de fausses assurances quant à la sûreté de ses produits. Le Wall Street Journal a indiqué en 2003 que "les producteurs de cultures génétiquement modifiées ont évité de répondre aux questions et présenté des informations erronées" sur la sûreté de leurs produits au gouvernement fédéral. Ils ont dépensé des centaines de millions de dollars en campagnes de relations publiques massives utilisant des techniques sophistiquées de "gestion de la perception", toutes destinées à donner de fausses assurances au public et aux agences gouvernementales sur l'utilité et la sûreté de leurs produits.
Lorsque des plantations ou des usines sont contaminées par des OGM, l'industrie n'est pas tenue de supporter les frais de nettoyage, comme ce serait le cas avec la contamination chimique. Au lieu de cela, les rappels massifs d'aliments et de cultures transgéniques sont subventionnés par le contribuable. Non seulement l'industrie ne paie pas les pertes des agriculteurs, mais en plus elle intente souvent des procès aux agriculteurs pour contrefaçon de brevet et en tire des avantages financiers.
Don Westfall, consultant en biotechnologie auprès de Promar International, l'exprime ainsi: "L'industrie espère qu'avec le temps, le marché sera suffisamment inondé qu'il n'y aura plus rien d'autre à faire que d'abandonner la bataille."
La nature de la transgression
Une transgression, en langage juridique, c'est "un acte illégal qui cause un préjudice à la personne ou aux biens". Elle évoque une intrusion, de façon furtive, par l'usage de la force ou de la violence. Elle implique aussi le droit de permettre ou de refuser une intrusion. Une transgression se produit lorsque ce droit a été violé. La technologie du génie génétique transgresse les biens communs. Cela, du fait de la manière dont les produits transgéniques sont conçus et de la manière dont "la vision moléculaire" est mise en oeuvre. Cette vision exigeait que la science fût compromise au point de négliger les conditions de la barrière complexe qui constitue la base même de la vie. Elle devait avoir la prétention démesurée de briser les barrières entre les espèces et de se placer directement sur le chemin de l'évolution, coupant les organismes de leur lignage héréditaire. En outre, elle exige d'user de la furtivité et de la violence pour envahir la paroi cellulaire, ainsi que d'implanter des êtres vivants transgéniques à l'intérieur d'un participant involontaire avec des organismes spécialement conçus pour vaincre toute résistance à sa brutale intrusion.
Cette transgression se poursuit par l'appropriation forcée d'organismes nouvellement créés sous la forme d'un brevet. Le brevetage d'un être vivant était largement considéré comme immoral, et jusqu'à ce que la Cour suprême des Etats-Unis approuve le brevetage de la vie en 1980, il était illégal. Avec cette décision, les intérêts privés ont obtenu le droit de posséder toute forme vivante non humaine sur la terre. Nous sommes clairement, comme le déclarait récemment le Président Bush, "la société de la possession". Aujourd'hui, lorsque les OGM pénètrent le monde sans frontières du libre échange et s'infiltrent dans chaque partie du réseau vital, ils portent avec eux la marque de leur propriétaire et privatisent en fait chaque organisme qu'ils pénètrent. Cela est d'autant plus inacceptable que cette technologie coûteuse n'est absolument pas nécessaire. L'essentiel de ce que vend la biotechnologie agricole, notamment les plantes résistantes aux insectes et les stratégies de lutte contre les mauvaises herbes, est déjà disponible par d'autres moyens. La sélection traditionnelle des plantes peut produire toutes ces avancées et même plus – y compris une productivité accrue, la résistance à la sécheresse et au sel, et même des enrichissements nutritionnels. Tout l'objet de l'utilisation commerciale de la technologie du génie génétique, ce sont les brevets et le fait qu'ils facilitent le contrôle de la société. La raison pour laquelle les OGM ont été introduits dans les cultures, c'est qu'ils permettent aux sociétés agrobiochimiques la maîtrise de réserves de semences, de contrôle des moyens et des méthodes de production alimentaire, et de tirer profit de chaque maillon de la chaîne alimentaire.
Le génie génétique est une manifestation – peut-être la manifestation suprême – du terme "dominance à large spectre". Dans le cas d'espèce, la dominance s'exerce à des niveaux multiples, d'abord par un contrôle biologique sur l'organisme lui-même, puis par un contrôle économique sur le marché, enfin par le biais d'un contrôle "perceptif" de l'opinion publique. Les OGM sont déguisés de manière à ressembler à leurs homologues naturels, puis sont lâchés dans la nature et dans la chaîne alimentaire humaine à travers une matrice de contrôle qui identifie et désactive toute barrière politique, légale, pédagogique ou économique qui pourrait contrarier les desseins de leurs propriétaires.
A la fin de mon enquête, j'arrive à la conclusion que le génie génétique est, du moins tel qu'il est utilisé dans l'agriculture, à dessein et par nature, envahissant et instable. Il a été imposé aux populations américaines d'une manière qui ne nous a laissé ni choix ni alternative, d'un point de vue biologique ou social. Par conséquent, la réalité est que l'héritage évolutionniste de nos vies, que ce soit en tant qu'êtres humains, abeilles, poissons ou arbres, a été bouleversé. Nous courrons le risque d'être coupés de nos lignées ancestrales et d'être détournés vers un tout autre monde, dont les dimensions physique et sociale sont encore loin d'être connues et restent encore à découvrir.
Extrait de l'article TRANSGRESSION disponible sur http://www.delaplanete.org/
Voir aussi:
OGM, une bénédiction pour la santé?
Non, les "BIO"-carburants, ne sont pas bio!