Notre mode de croissance est de nature toxicomane, il vient compenser des éléments de mal-être dans la société. Mais on ne peut se contenter
de dire que, pour des raisons de nécessité écologiques, il faut organiser un sevrage. Si l'on ne propose pas de solutions positives, notre société sera comme un toxicomane qui préférera garder sa
toxicomanie, quitte à en crever, plutôt que d'accepter la cure. C'est pourquoi il est essentiel
de travailler autant sur l'espérance et le désir que sur la lucidité et l'alerte.
Le sociologue Max Weber disait que l'on était passé de l'économie du salut au salut par l'économie. Eh bien, nous vivons la fin de ce grand cycle culturel du salut par l'économie. Dès lors, l'idée qui se répand dans les milieux économiques qu'une "autre croissance" va permettre un rebond de l'économie est totalement insuffisante. Bien sûr, les technologies sont utiles, parce que l'ampleur du problème est telle qu'il faut avancer sur tous les terrains à la fois, et il n'y a aucune raison de se priver de cette approche. Mais comme le cœur du problème est lié aux grandes industries de mal-être et de maltraitance, si on ne va pas attaquer les causes de ce mal-être et de cette maltraitance, on aura rien résolu.
Par exemple si l'on utilisait ne serait-ce que 10% des dépenses passives(1) de mal-être
– la publicité, l'armement, les stupéfiants – vers des dépenses actives(1) de mieux être, cela permettrait de
traiter des grand problème du Sud – faim, malnutrition, eau, santé -, et cela permettrait aussi de changer fondamentalement les modes de production, de consommation, et de vie,
dans notre propre système de développement.
Il faudrait, par exemple, investir 1,5 milliard de dollars pendant 10 ans pour que les 300 millions d’Africains, qui n’ont pas d’eau potable, puissent y accéder et pour que 80% d’entre eux
puissent accéder à l’assainissement. En comparaison, tous les ans, les pays occidentaux subventionnent leur agriculture à hauteur de 350 milliards de dollars. Et tous les ans, les
dépenses militaires mondiales sont de l’ordre de 900 milliards de dollars.
Patrick VIVERET, Reconsidérer la richesse
(1) Il est temps de mettre fin à l'hypocrisie ambiante du capitalisme, soit disant que « la satisfaction égoïste
individuelle concoure à la satisfaction collective » (Dogme1). C'est
certainement la plus grossière erreur jamais commise dans l'histoire de l'humanité. Vivre en société est un acte solidaire! Par obligation de survie dès les premiers pas de l'homme...(Dogme3 et Dogme4). Et aujourdhui? La Nature n'est plus si hostile mais à force de
domination et d'égoïsme nous retournons à l'âge de la pierre pour réapprendre la solidarité.
« Viens m’aider ! Celui qui fit comprendre à son semblable le sens des mots est le fondateur inconnu de toutes les sociétés humaines » [Jacques Duboin]