En ces temps de fausses bonnes déclarations, une petite relecture de Samir AMIN peut aider.
Les Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) ont été adoptés dans une résolution de l'Assemblée générale des Nations unies (intitulée « Déclaration du Millénaire») en date de septembre 2000, par acclamations. Cette innovation procédurale, dite de « consensus », tranche avec la tradition de l'ONU qui exigeait une préparation sérieuse des textes de ce genre, longuement discutés en commissions. Elle témoigne donc simplement d’un changement des rapports de force internationaux, permettant l’hégémonisme des Etats-Unis et de leurs alliés européens et japonais sur une ONU domestiquée. Ces Objectifs du Millénaire avaient d’ailleurs été rédigés par Ted Gordon, consultant connu de la CIA…
L'examen critique des OMD et des moyens qu'exigerait leur mise en oeuvre conduit à la conclusion que les OMD constituent une litanie de voeux pieux accompagnés de conditions qui annihilent largement la possibilité qu'ils deviennent réalité. Pire, à l'analyse des faits et des logiques sous-jacentes, ils apparaissent comme de la poudre aux yeux jetée pour faire accepter les impératifs du libéralisme au service des intérêts du capital mondialisé dominant. Les objectifs prioritaires réels sont:
1. la privatisation à outrance, destinée à ouvrir des champs nouveaux à l'expansion du capital;
2. la généralisation de l'appropriation privative du sol agraire;
3. l'ouverture du commerce et des mouvements de capitaux dans un cadre de dérégulation maximale;
4. l'interdiction de principe faite aux États de s'immiscer dans la vie économique.
En contrepoint, la restauration d'une marge d'autonomie des États, la reconnaissance de la légitimité de leur intervention (définition même de la démocratie), dans une perspective multipolaire, sont les conditions nécessaires incontournables pour que les objectifs sociaux proclamés par les OMD puissent être atteints.
Par Samir AMIN pour le CETRI, alternatives sud, volume XIII, 2006/1 : Objectifs du millénaire pour le développement.
Et tant que nous sommes dans les bonnes farces, en voici 2 autres aussi bonnes et croustillantes que la fameuse (fumeuse) élection d’Obama prix Nobel de la paix :
1. Yves LETERME correspondant Belge à l’ONU pour les Objectifs du millénaire pour le Développement. C’est dire si le « gouvernement » Belge se préoccupe fort de ces objectifs du millénaire ! Son objectif premier est nombriliste, une grande constante de nos jours. Et pour être encore plus ridicule que jamais, elle envoie son schtroumf favori à l’ONU.
2. Le Rwanda à été choisi comme exemple pour les OMD ?!
Oui, en effet, en terme purement comptable et économique, le Rwanda est un exemple : trottoirs clean, exempt de haillons, sillonnés de costars cravates, grandes vitrines commerciales, buildings à tous les coins de rues, villas somptueuses en périphérie, etc.
Sûr, le Kigali d’il y a 10 ans est méconnaissable. Méconnaissable pas seulement pour la capitale moderne et bien achalandée qu’elle est devenue mais aussi parce que les gens ne parlent plus français mais anglais (contraints et forcés). Méconnaissable aussi par l’absence de mendiants, de déchets, de bidonvilles, d'artisants, de petites échopes le long des routes. Méconnaissable enfin par le constant climat de délation et de peur qui y règne. « Le problème au Rwanda, c’est la peur » un article qui brosse une image un peu plus objective de « l’exemple Rwandais ». Article dans lequel on pourra également lire qu'une très grande partie des richesses du Rwanda sont issues de l'exploitation minière illégale dans l'Est de la RDC.
Lire aussi: CONGO, NORD-KIVU, GOMA: Chine vs USA?
J'entends la tempête. On me parle de progrès, de "réalisations", de maladies guéries, de niveaux de vie élevés au-dessus d'eux-mêmes.
Évidement
Moi, je parle de sociétés vidées d'elles-mêmes, des cultures piétinées, d'institutions minées, de terres confisquées, de religions assassinées, de magnificences artistiques anéanties, d'extraordinaires possibilités supprimées.
On me lance à la tête des faits, des statistiques, des kilométrages de routes, de canaux, de chemin de fer.
Moi, je parle de milliers d'hommes sacrifiés au Congo-Océan. Je parle de ceux qui, à l'heure où j'écris, sont en train de creuser à la main le port d'Abidjan. Je parle de millions d'hommes arrachés à leurs dieux, à leur terre, à leurs habitudes, à leur vie, à la danse, à la sagesse.
Je parle de millions d'hommes à qui on a inculqué savamment la peur, le complexe d'infériorité, le tremblement, l'agenouillement, le désespoir, le larbinisme.
On m'en donne plein la vue de tonnage de coton ou de cacao exporté, d'hectares d'oliviers ou de vignes plantés.
Moi, je parle d'économies naturelles, d'économies harmonieuses et viables, d'économies à la mesure de l'homme indigène désorganisées, de cultures vivrières détruites, de sous-alimentation installée, de développement agricole orienté selon le seul bénéfice des métropoles, de rafles de produits, de rafles de matières premières.
Discours d'Aimé CÉSAIRE sur la mondialisation, euh non, la colonisation...