Quand on creuse un peu, on se rend compte a quel point la finance est un monde vaste, complexe et impitoyable. C'est d'ailleurs le sujet principal de bon nombre de sites Internet et de publications. Loin de moi l'idée de leur faire concurrence. Dans cet article, j'ai juste voulu faire un état des lieux général de cette fameuse crise des "subprimes" dont on parle tant.
L'article étant particulièrement long, j'en ai fait un document que vous pouvez télécharger ici et éventuellement imprimer recto-verso. N'hésitez pas à réagir en cliquant sur le lien ajouter un commentaire en bas de cet article.
Accrochez vous car ce qui se passe depuis un peu plus d'un an dans le monde de la finance ressemble à s'y méprendre aux grandes catastrophes climatiques du monde réel. Des ouragans, aux grandes sécheresses et grandes inondations, nous n'avons encore rien vu. Le "meilleur" reste à venir. La seule différence c'est que la crise financière concerne le sous-système humain qui a gangréné tout le reste, alors que la crise climatique concerne le méga-système dont nous faisons tous partie, que nous avons ignoré et que la Nature se chargera de nous rappeler à sa manière. Notez également que l'homme n'a pu croire s'affranchir de ce méga-système que par sa connaissance, son orgueil et sa très forte dépendance au pétrole. Ajoutez donc à ces deux crises (financière et climatique), la crise du pétrole, le fragile équilibre des écosystèmes et vous obtenez… un puissant cocktail Molotov aux subtils mélanges d'arrogance, d'avidité et d'hypocrisie.
Lisez aussi cet excellent article: De la crise des subprimes à la crise globale
CONSTAT
BANQUES
2007/09: Northern Rock donne des sueurs froides à l'Angleterre
2007/11: HSBC, une banque britannique également touchée par la crise des subprimes
2008/03: Bear Sterns déclaré en faillite mais sauvé par la Fed qui a allongé 30 Mds $ par l'intermédiaire de la banque commerciale JP Morgan.
2008/05: En Belgique, Fortis, Dexia et KBC sont logés à la même enseigne. La chute de leur bénéfice au premier trimestre traduit sans équivoque l'effet néfaste de la crise du subprime.
2008/06: Deutsche bank admet avoir fait des faux pas dans le créneau du subprime. Elle devra réévaluer la valeur d'engagements pour 29 milliards d'euros.
2008/06: UBS & Crédit suisse, les deux plus grandes banques suisses, ont annoncé lundi des revers dans leurs résultats trimestriels, UBS redoutant d'avoir perdu jusqu'à 800 millions de francs suisses sur la période.
2008/07: Indymac, l'un des plus gros prêteurs hypothécaires américains, a été mise, vendredi 11 juillet, sous tutelle des autorités fédérales. Elle devient le plus important établissement bancaire à faire faillite aux Etats-Unis depuis vingt-quatre ans.
2008/07: 3 nouvelles banques s'effondrent en bourse (blog Tropical Bear)
- Washington Mutual (WAMU) a chuté de 34,7% hier (14/07/2008, cours divisé par 14 en moins d'un an). Cette banque gère 320 milliards de $ d'actifs, mais ne capitalise plus que 3,4 milliards de $ en bourse.
- National City Corp a chuté de 26% hier (14/07/2008, cours divisé par 10 en moins d'un an). Elle gère 155 milliards de $ d'actifs, et capitalise seulement 2,43 milliards de $.
- Lehman Brothers a chuté hier de « seulement » 7,6% (cours divisé par 6 en un an). Elle gère 639 milliards d'actifs, pour une capitalisation de seulement 9,26 milliards de $.
Action concerté des banques pour financer la finance (blog Carnets de nuit)
Cette action concertée des banques donne la juste mesure de l'ampleur de la crise!
Plusieurs banques centrales (la Fed, la BCE, la Banque nationale Suisse, la Banque du Canada et la Banque d'Angleterre) ont enfin agi de manière concertée pour injecter des liquidités sur les marchés. La Réserve Fédérale Américaine a même créé une nouvelle procédure qui va lui permettre de prêter près d'un tiers des bons du Trésor US (200 sur 713 milliards de dollars) sur des garanties par définition peu fiables. (…) D'ici à ce que les bons du trésor américain ne valent plus rien (...) Le besoin de liquidités est abyssal, non pour financer directement l'activité économique, mais pour financer la finance et compenser ou camoufler ses errements des dernières années. (…)
Fond d'investissement
2008/02: KKR Financial Holdings, filiale de KKR, a reporté pour la deuxième fois en cinq mois le remboursement de milliards de dollars de papier commercial et entamé une nouvelle série de négociations avec ses créanciers. Cette mesure permet d'organiser des "discussions en vue d'un rééchelonnement".
2008/03: Carlyle Capital Corporation, le fonds d'investissement américain a annoncé jeudi sa probable faillite après avoir fait défaut sur près de 17 milliards de dollars de dette, nouveau signe inquiétant de l'aggravation de la crise financière.
2008/03: Blackstone, le fonds d’investissement new-yorkais a perdu 170 millions de dollars au 4ème trimestre 2007, la crise ayant fortement ralenti les LBO de grande ampleur.
2008/08: Mais dans toute cette déconfiture, les rapaces sont toujours bien présent KKR et Blackstone, les nouveaux King du capitalisme s'en lèchent les doigts…
Organisme de crédit
2008/01: Countrywide Financial (CFC) racheté par Bank of America (BAC) pour environ 4 milliards de dollars US. Une transaction qui s'apparente au sauvetage d'une société frappée de plein fouet par la crise du crédit immobilier aux États-Unis.
2008/07: Freddie Mac & Fanny Mae, deux grandes agences de refinancement, se trouvent en grandes difficultés financières. "Une faillite de Freddie Mac et Fannie Mae n'est pas même envisageable, tant leur effondrement aurait un impact cataclysmique sur l'ensemble de l'économie américaine. Les deux entreprises détiennent ou garantissent 5200 milliards de dollars de crédits immobiliers, soit plus de 40% des prêts au logement du pays."
REHausseur de crédit
2008/01: les rehausseurs de crédit (MBIA, Scor, FSA, Ambac…), dont la solidité financière est reconnue par les agences de notation, sont désormais dans le rouge et risquent pour certains la faillite.
Capitalisations boursières
En un an, la hiérarchie au sein des grandes capitalisations a été renversée
Citigroup, AIG, General Motors: tous les 3, géant dans leurs secteurs - bancaire, assurance, automobile - ont vu leur valeur divisée par 3 en un an. Citigroup qui faisait partie il y un an du top10 des plus grandes capitalisations mondiales est aujourd'hui relégué à la cinquantième place. En contre partie, la banque chinoise ICBC a pris sa place dans le classement du top10. AIG, premier assureur au monde a littéralement dévissé du tiers de sa valeur. Quant à General Motors, le spectre de la faillite se fait de plus en plus insistant. Voir aussi General Motors n'en finit plus de se restructurer.
Indices boursiers
A New York, le Dow Jones, le plus vieil indice des bourses de New York, à perdu 20% de sa valeur en 1 an (1).
A Paris, le CAC 40, déterminé à partir du cours de 40 actions dont les échanges sont les plus abondants sur la bourse de Paris, est passé de 6000 points à 4200 points. On peut parler d'une crise boursière, puisque le CAC 40 a cédé plus de 30 % depuis début janvier 2008.
A Londres, l'indice FTSE 100, à perdu 15% de sa valeur en 1 an (1).
A Bruxelles, le Bel 20, en un an, l'indice belge des 20 plus grosses cotations boursières a chuté de 32,7%.
A Genève, le Suiss Market Index, a perdu 23% de sa valeur en 1 an (1).
(1) Voir sur Boursorama, graphique historique des indices boursiers sur un an .
En un mot comme en 100, les bourses Européennes commencent à saigner.
Par contre, le Japon semble à l'abri de cette crise du "subprime". Suite à la sérieuse claque du Japon en 1990, les banques et investisseurs sont devenus un peu plus prudents et n'ont pas ou peu souscrit aux crédits poubelles. Quant à la Chine, elle n'est pas à l'abri et elle reste largement dépendante de l'économie américaine.
POURQUOI?
La question qui se pose alors est "pourquoi une telle crise?". Les banques peuvent toujours saisir les biens pour lesquelles elles ont accordé un crédit non? He bien non! Le système est devenu à ce point abscons, opaque et complexe que les banques sont incapables de présenter le titre de propriété des dits biens.
Pour bien comprendre cette fameuse crise des "subprime" et ce qui nous attend, je vous invite à lire l'excellent article de F. William Engdahl: La crise des subprimes n'est que la première vague annonciatrice d'un grand tsunami financier.
Nous sommes passés d'un système "d'initiation de crédit pour porter le risque" à un système "d'initiation de crédit pour vendre le risque". La Crise Financière: cause, effets et réformes nécessaires
Lorsque ces banques et fonds d’investissements, tous privés, approchent de la faillite pour avoir trop spéculé, pour avoir à ce point acquis des actifs risqués sous formes de créances titrisées qu’elles ne savent même plus de quoi sont composés leurs portefeuilles d’actions, leur sauvetage est réalisé grâce à l’intervention massive des pouvoirs publics. On retrouve la privatisation des bénéfices et la socialisation des pertes (bascules).
http://www.humanite.fr/Crise-financiere-Privatisation-des-benefices-socialisation-des-pertes
ESTIMATION DES Dégâts
Dominique Strauss-Kahn - nouveau directeur général du Fonds Monétaire International - a tiré la sonnette d’alarme sur la crise financière, avec son évaluation d’un coût de 1.000 milliards de dollars de dépréciation d’actifs (1000 Md$, c'est le PIB des Etats-Unis divisé par 14).
Jacques Attali a déclaré le 18/01/2008 au JDD, information reprise le jour même par FRANCE2: «Nous sommes au bord d'une récession. Elle tire son origine de l'effondrement du marché du crédit hypothécaire américain. Elle a détruit, en quelques mois, des richesses égales à 10 % du PIB mondial, soit 4.000 milliards de dollars, c'est-à-dire 50 fois plus que les pertes générées dans les industries de pointe par l'explosion de la bulle internet», analysait dimanche Jacques Attali dans le JDD. Et l'ancien sherpa de Mitterrand d'ajouter : «on est passé, en une semaine, de l'euphorie à la panique : plus personne ne prête à personne. Plus aucune banque ne prête à une autre banque. Et si les banquiers continuent à paniquer, nous risquons une crise de 29. D'ailleurs, aux Etats-Unis et ailleurs, certains grands patrons de la finance me disent en privé : "Nous sommes en 1928"!
Tropical Bear, dans une estimation datant de novembre 2007, avance le chiffre 3300 milliards de dollars par an de pertes directes et indirectes sur les 3 prochaines années! Et l'auteur de rajouter "que ses hypothèses de base sont modérées (…) que les pertes globales correspondent à 20% du PIB US (…) qu'il y a largement de quoi déclencher une puissante récession aux USA, se répandant ensuite à l'ensemble de l'Europe et même des pays émergents."
Selon Junon MONETA, les estimations de chiffrages de la crise liée aux subprimes varient entre 1000 et 4000 milliards de dollars, la raison de cette large fourchette proviens du mélange des pertes en capital (1000 Md$) et des pertes des OPCVM (4000 Md$). Selon ses sources, Junon MONETA estime la perte globale (capital & OPCVM avant bascules: privatisation des bénéfices, socialisation des pertes) à 1600 milliards de dollars, uniquement pour les subprimes… avec 60% de pertes aux USA, 20% en zone Euro et 20% en Europe hors zone Euro. «Ce sont donc nos retraites complémentaires et nos économies qui vont en prendre un coup car la Haute Finance a déjà fait ses bascules, on le sait, mais on ne sait pas encore combien!» Junon MONETA.
Alan Greenspan - ancien gouverneur de la Réserve fédérale américaine (Fed) - «la finance mondiale sera plongée dans l'une des plus grave crises depuis la fin de la seconde guerre mondiale.»
Sympathique Alan! Aujourd'hui hors circuit avec une pension bien confortable, il a beau jeu d'écrire ses mémoires (Age of turbulence) en critiquant le fragile et dangereux échafaudage financier auquel il a lui-même largement contribué. Allan sait de quoi il parle!
"La bulle immobilière US qui a débuté vers 2002 a atteint son sommet lorsque Alan Greenspan a enclenché en 2005 et 2006 la plus agressive série de réductions de taux d'intérêt de toute l'histoire de la banque centrale des États-Unis, la Fédérale Réserve (la Fed). Tel que Greenspan l'a admit à l'époque, son intention était de remplacer la bulle Internet [Dot.com en anglais] par d'importants investissements immobiliers domiciliaires et par une bulle de prêts hypothécaires. Il prétendait que c'était le seul moyen d'éviter que l'économie US n'entre dans une profonde récession. Rétrospectivement, nous pouvons dire qu'une récession en 2002 aurait été beaucoup plus douce et moins dommageable que celle à laquelle nous sommes maintenant confrontés." La crise des subprimes n'est que la première vague annonciatrice d'un grand tsunami financier.
UNE GIGANTESQUE BULLE
En dix ans, les prix de l'immobilier ont doublé de part et d'autre de l'Atlantique! Les organismes de crédits profitent des petits-payeurs qui s'endettent pour les rembourser et les intérêts s'accumulent : une bulle de liquidités s'est constituée qui ne repose sur… rien. Cette bulle de liquidités n'échange ni biens ni services et se compte aujourd'hui en milliers de milliards de dollars pour atteindre 6,7 fois le PIB mondial!
Pour lire ce rapport gratuit, cliquez sur le lien ci-dessous :
http://www.publications-agora.fr/pdf/krach.pdf