Ancien chef d’une grosse entreprise du bâtiment, Pierre Lantermoz (président du tribunal de commerce de Saint-Etienne) est en prise directe avec le quotidien des entreprises. Au fil des audiences, il constate une augmentation alarmante des dépôts de bilan, qui touchent désormais les grosses entreprises de la région.
FRANCE-SOIR. Le nombre de liquidations a-t-il augmenté depuis le début de l’année ?
PIERRE LANTERMOZ. Au 6 mars, nous avons eu 143 procédures de redressement ou de liquidation judiciaire concernant 1.098 salariés, contre 62 en février 2008 concernant 159 salariés. Le nombre de procédures a déjà doublé et le nombre d’employés concernés a été multiplié par sept ! Des chiffres qui donnent une orientation pour l’année à venir. Pour faire face à l’augmentation du nombre de dossiers, nous allons passer de un à trois juges en matière de prévention.
Vous traitez donc davantage de grosses entreprises ?
Oui, la bascule s’est faite pendant le dernier trimestre 2008. Les grosses entreprises de 40 à 100 salariés tombent les unes après les autres. Il y a des ruptures de charge de travail allant de 50 à 80 %… C’est affolant. Nous avons eu le cas d’une entreprise d’éléments de machines textiles de 46 salariés. En novembre, elle n’avait plus de travail que pour 16 d’entre eux et pour 6 en février. Elle a été contrainte de licencier. Avant, nous avions principalement de jeunes et petites entreprises.
Quels sont les secteurs les plus touchés ?
A Saint-Etienne et dans son agglomération, les restaurants, les petits commerces, l’immobilier sont touchés. Les plus pénalisés étant les transporteurs, gros et petits, les sous-traitants du bâtiment et surtout de l’automobile, et la mécanique en général. En fait, cette crise n’est pas sectorielle, elle touche tout le monde et nous n’avons aucune visibilité.
La situation va-t-elle encore se dégrader ?
C’est sûr. Je ne pense pas qu’un redressement soit possible dans les mois qui viennent. Le retour de la confiance et la relance de la croissance arriveront plus tard.
Le plan de soutien aux entreprises lancé par le gouvernement peut-il être efficace ?
Le plan de soutien est une bonne chose, mais cette crise est un gouffre sans fond, personne ne sait où ça va s’arrêter. Cette année, plus de 10 % des entreprises déposeront le bilan. C’est un véritable effondrement de l’économie.
Comment vivez-vous ces audiences en tant que juge, en tant qu’ancien chef d’entreprise ?
Je suis sincèrement malheureux face au désarroi des entrepreneurs. Après une défaillance, souvent on voit ce que l’on appelle les « 3D » : dépôt de bilan, divorce et dépression. L’entrepreneur n’a droit à rien, contrairement aux salariés, et se retrouve démuni. Au tribunal, nous prenons le temps de les écouter, parfois ils s’accrochent à nous comme à un frère. Humainement, c’est très dur. Nous sommes inquiets et craignons des suicides pour certains d’entre eux, très fragilisés par la situation.
Source: France-Soir
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Licenciements massifs, faillite, misère, crise, restructurations, privations nécessaires… et, moins fort, en bas de page, une hausse des dividendes pour les actionnaires?! Heureusement, c'est tellement visible, actuel et mondialisé qu'on en parle… Voyez la Suisse qui rouspète suite aux pressions de levée de secret bancaire car elle risquerait de perdre des milliards d'euros. Milliards à mettre en parallèle avec, par exemple, les malheureux millions fournis par les pouvoirs publics wallons pour soutenir les PME dans leur demande de crédits pour investissements à long terme. Voir Caisse d'investissement wallonne pour relancer le crédit.
Il n'y aurait pas un problème?
Toujours convaincu que les altermondialistes sont des doux-dingues? Toujours convaincu que
- les révoltes en Guadeloupe, Guyane, Martinique, Réunion sont sans fondement?
- les soulèvements populaires en Equateur, Vénézuela, Bolivie, Paraguay envers l'impérialisme économique (Brésilien & Étasunien) ne sont que beaucoup de bruit pour rien?
- les manifestations et crises de la faim dans une majorité de pays africains juste une mauvaise passe?
- le terrorisme et les mouvements radicaux (FARC de Colombie, Hamas de Palestine, MEND du Nigeria, Zapatistes du Mexique, Islamistes d'Asie du Sud-est, etc.) sont à combattre par la force?
- les grèves suite aux coupes rases d'un secteur privé toujours plus gourmand et répondant à la seule logique d'optimisation par les coûts sont un mal nécessaire?
- les crises sanitaires et agricoles un peu partout dans le monde sont le prix du progrès?
C'est ça la mondialisation! Nous sommes tous de la même famille. Syndicats, islamistes, paysans, communistes, autochtones, altermondialistes, faucheurs d'OGM, nous faisons tous partie de la même famille. Déambuler dans les rayonnages du culte marchand professant sa liturgie libérale et publicitaire c'est démolir le monde. C'est affecter la vie de vos enfants, de nos enfants, des enfants du monde et de l'humanité.