« Le changement climatique, le chômage et le vieillissement de la population ne peuvent être résolus avec le système monétaire en place. C'est au centre de notre tabou monétaire que nous trouverons, ou non, les forces indispensables au changement de paradigme. » Bernard Lietaer
Déjà abordé dans l’article démocratiser la monnaie, comme pour la fée électricité et pour tous les domaines, trop de concentration est mortifère pour la société. Société entendu étymologiquement comme compagnon ou associé, ce qui ne s’applique pas à la poignée de ceux qui sont à la tête de cette concentration : « Tout pour nous-même, rien pour les autres » comme disait si bien Adam Smith père fondateur du système néolibéral. Philosophe avant tout, Smith avait parfaitement explicité la logique primaire du néolibéralisme.
Sortir de la boîte (Thinking out of the box), nous dit Bernard. C’est aussi ce que nous dit Susan Georges dans son ouvrage «La pensée enchaînée» (Hijacking America). C’est la clé de la philosophie. Pour ne pas finir dans un bain de sang, nous devons sortir de nos paradigmes et archétypes ou plus précisément ici, du paradigme mondial de la pensée néolibérale, insufflé par Hayek mais déjà clairement théorisé par Smith en 1776 et largement pressenti par Aristophane et Platon, 400 ans avant JC.
Plus de 200 crises économiques depuis l’instauration des systèmes monétaires centraux ! Ne serait-il pas temps de penser autrement ? C’est ce que Bernard Lietard nous propose dans ce dernier ouvrage «Au cœur de la monnaie» paru chez Yves Michel fin août 2011.
Comme je ne l’ai pas encore lu, je reprends ici la description qu’en a faite Christian Arnsperger dans son dernier article paru sur son blog.
Expert de la chose financière, Bernard Lietaer nous convie à un passionnant voyage de vingt-huit mille ans jalonné par des archétypes, de la préhistoire à Wall Street. Il aborde notamment ceux de la Grande Déesse, de la féminité, de l’argent Yin. La mise en lumière de la dimension émotionnelle de la monnaie nous renvoie aux tréfonds de notre psyché. Il s’agit de guérir nos blessures face à l’argent pour le remettre à sa place de serviteur, au lieu de maître. Pouvons-nous encore éviter les immenses dégâts et le chaos dans lequel nous plongera un effondrement de l’ordre établi il y a six ou sept cents ans? C’est ce que pense cet expert de niveau mondial sur les questions monétaires, et grand humaniste, dans cet ouvrage surprenant.
Alors que la situation du système monétaire global de la planète semble devenir ingérable, ce travail de recherche, très bien documenté, ouvre des opportunités exceptionnelles pour trouver des réponses innovantes hors du cadre de la pensée unique. L’auteur tire de ce voyage des enseignements très actuels pour éclairer les choix monétaires du XXIe siècle.
La crise systémique, économique, géopolitique, énergétique et alimentaire qui a pris une nouvelle tournure avec les émeutes au proche et moyen Orient, ainsi qu’avec l’accident de Fukushima, demande d’urgence bien plus que des mesures correctives. Or, selon l’auteur, c’est au centre de notre tabou monétaire que nous trouverons, ou non, les forces indispensables au changement de paradigme. C’est bien le monopole de cette monnaie « yang », et non pas une perversité humaine, qui nous pousse irrémédiablement au court-terme et à l’épuisement des ressources. Et ce sont bien les ombres de nos archétypes qui nous aveuglent et nous empêchent de remettre en question ce tabou moderne.
Bernard Lietaer a derrière lui trente ans d’expériences professionnelles: haut fonctionnaire de banque centrale et directeur général de fonds monétaires ; consultant auprès de firmes multinationales, mais aussi de pays en développement ; professeur de finance internationale à l’Université de Louvain, avant de devenir le plus haut dirigeant en charge des services d’organisation et d’informatique de la Banque Centrale de Belgique. Son premier projet, en cette fonction, a été de dessiner et d’implanter le système de la monnaie unique européenne. Pour l’autre côté du miroir, il a aidé des pays en développement d’Amérique latine à améliorer la solidité et l’attractivité de leurs monnaies.